La colère des dieux *LIBRE

La colère des dieux
*Libre

La langue bifide de ces quelques serpents électriques vint violemment frapper le commun des mortels ; et la lumière opalescente de son poison déchira le dôme céleste avant de s’effacer. S’ensuivit une plainte déchirante. Effrayante. Un cri de douleur dont l’écho se répercuta contre la pierre fendue avant de disparaître à son tour, avalé par les ténèbres oppressantes. La souffrance en était telle, que ce cri n’était plus qu’un râle. Comme à chaque temps orageux, en cet instant où le jour et la nuit n’étaient plus, la Terre semblait proche de l’apocalypse.Un éclair. Une lame de couteau qui déchira violemment le dôme céleste..

« Terre, que ta souffrance soit mienne.«

Pourtant, la foudre qui s’abattait avec haine et rage semblait ne pas vouloir déverser sur toi sa colère grandissante, te toucher avec sa pointe aussi venimeuse que les crochets d’un serpent. Par peur de toucher ce corps malsain, cette âme qui n’est plus rien. La Terre ne veut pas se délester de sa souffrance, de donner une partie de ses ressentir. Par peur d’être souillée par ce sang impur qui coule dans tes veines. Ils ne veulent pas de toi, car tu es une erreur. Parce que tu n’es qu’un monstre, parce que tu n’es rien. Ta tête squelettique, ce masque effrayant, levée vers ce gouffre intense qui obstruait le dôme céleste, tu regardais les éclairs tomber sur la terre sans ne jamais te toucher. Une de ces fourches meurtrières toucha un arbre mort, perchoir pour vautours affamés, d’une telle violence que ce squelette végétal se déchira en deux et tombas avec fracas sur le sol. Pourquoi n’était-ce pas toi que ces serpents électriques venaient déchirer en deux, pour enfin libérer ton âme et partir loin ? Ne plus jamais revenir ? Tout simplement parce que tu ne le mérites pas, Nea. Les êtres comme toi ne doivent pas mourir avant l’heure. Les êtres comme toi, ils doivent vivre. Et payer pour ce qu’ils ont fait. Mais comment payer, quand la Terre le refuse ?

Les larmes inondèrent ta fourrure sans couleur.

Un éclair rasa un arbre de près, s’écrasant au loin dans un bruit sourd. Et c’était par ce temps orageux que notre mâle avait décidé d’errer, malgré le sale temps. Trottinant sans un mot, sa silhouette se dessinant lentement à l’horizon. Le canidé errait, en fier vagabond, découvrant de nouveaux lieux et de nouveaux paysages pour sa propre satisfaction. Sans un mot, il poursuivit sa route, toujours plus loin, toujours seul. Il était chien, il était loup. Aussi fier que les loups, aussi vagabond qu’eux et peut être aussi bon chasseur. Il n’avait pas eu le choix, depuis toujours il vivait à la rue. Il avait du apprendre à chasser, car plutôt mourir que de mendier de la nourriture. Une ou deux fois il avait déjà volé un poulet au marché, mais rien ne le satisfaisait plus que le sang d’une proie dans sa gueule. Il n’éprouvait jamais autant de plaisir que durant une chasse, seul moment où il se sentait vibrant de vie et frissonnait de plaisir sanglant. Et aujourd’hui il avait décidé de chasser, l’appel du ventre étant plus fort que l’appel du vent. Sans un mot Usual huma l’air, et lorsque l’odeur d’un lièvre se fit sentir, il esquissa un sourire satisfait avant de se diriger vers son futur repas. Une fois assez proche, le canidé se tapis alors dans l’herbe, devenant invisible. Et dans ce temps maussade, il était encore plus difficile de déceler sa sombre silhouette. Un bond. Un seul. Et voila le lièvre coincé dans sa gueule de carnivore. D’un coup de croc, le mâle lui brisa la nuque et pu entamer son repas bien mérité. Il l’engloutit en quelque secondes, et désormais repu, il reprit sa course contre le vent.

D’un bond il s’élança, commençant à galoper dans un silence complet. Le vent sifflait près de ses oreilles qui restaient plaquées contre son crâne. Un nouveau coup de tonnerre retentit, brisant un arbre en deux sur le coup. Ne prenant pas la peine d’admirer le spectacle, il poursuivit sa course jusqu'à ce que la silhouette à peine perceptible d’une chienne le força à ralentir. Faîtes de brume et de charbon, la jeune chienne était immobile. Mais même de loin, notre mâle percevait sa respiration saccadé. Curieux, mais étonnement méfiant, il s’approcha d’elle à pas de loup. Il s’arrêta à un mètre d’elle et enfin il comprit. Dans les yeux de la demoiselle se lisait sa folie, sa peur et toute une détresse dont il ne comprenait pas encore les raisons. Et les perles salées qui coulait le long de ces joues, se mélangeait à la pluie, inondant le sol et la terre qui absorbait sans un mot ce qu’on lui donnait. Usual resta silencieux. Il était ainsi. Un vagabond solitaire. Et sa simple présence constituait un exploit. Ce serait à la jeune chienne de parler la première, du moins si elle le désirait. Elle n’en eu pas le temps, un nouvel éclair lui coupa la parole et le serpent de foudre s’écrasa à quelques mètres d’eux. Sans que notre mâle ne bronche.

Alors demoiselle malheureuse ? qui es tu ?

« Pourquoi donc avancer ? »

Le canidé resta silencieux, plongé dans son mutisme il observa la jeune chienne. Celle-ci semblait plongée dans ses pensées, et elle n’était pas prête d’en sortir. Le husky la sentait traumatisée, mal dans sa peau, folle peut être. Il percevait les horreurs qu’elle voyait, les insultes dont elle s’accablait. Et il resta silencieux. Impassible devant les hurlements de la demoiselle qui se noyait dans l’orage, ignorant les perles salées qui roulaient le long de sa joue et que la terre étouffée avec plaisir. Et il resta de marbre, n’ayant nullement pitié de cette silhouette noire et blanche qui se mouvait avec lenteur dans un monde qui n’était pas le sien, un monde qui ne lui convenait pas, un monde qui ne voulait pas d’elle. Puis la voix de la demoiselle s’éleva, entre deux larmes elle l’avait aperçut et sa question, qui n’en était pas vraiment une, s’éleva dans un souffle à peine audible, rompu par les éclairs et la pluie. Usual resta immobile et répondit, sa voix grave s’élevant, caressante, forte, remplie d’un on ne sait quoi impressionnant.

Et il se tut de nouveau. Sa fourrure dégoulinante de pluie, dévoilant ses muscles puissants sous sa peau. Les prunelles métalliques du canidé se plantèrent dans celles de la demoiselle. Allez relève toi, prouve-moi que tu vaux mieux que ça. Le corps squelettique de la chienne s’écroula, elle fut prise de spasme mais il ne réagit pas. Que faire de toute manière dans une pareille situation ? Certes il aurait pu aider son corps, mais il n’avait pas le pouvoir de panser les plaies de l’âme. Et si l’âme est déchirée, on ne peut rien faire pour l’aider.

» { Le goût amère de la Mort. | Libre